Hésitations

Elle tergiversait à chaque décision.  

Il arrivait qu’en fin de compte, sa conclusion rejoigne l’option envisagée initialement. Elle donnait l’impression de retomber sur ses pieds, mais le gain n’était pas nul, contrairement à ce que l’on pouvait croire.  

D’avoir prospecté diverses alternatives, de les avoir expérimentées ne serait-ce que mentalement, elle les avait épuisées. 

C’est alors que la solution s’imposait, l’affranchissant pour toujours de ses doutes lancinants. Mais si l’entourage avait l’idée malencontreuse d’accélérer son choix, d’interrompre ses supputations pour forcer un résultat qui semblait probable dès le départ, le temps qu’il pensait avoir gagné lui était retiré, tant il apparaissait bientôt que la phase d’incubation était incontournable.  

Car c’est seulement rassérénée par ses manœuvres dilatoires qu’elle parvenait à museler le regret (celui de renoncer, en optant pour une voie, à d’autres existantes), à assouvir un peu de ce perfectionnisme qui la forçait à exploiter le potentiel en germe dans chaque instant.  

Elle sentait néanmoins, à ne pas s’engager de manière plus tranchée, qu’elle s’enfermait dans l’inquiétude d’un dilemme permanent. 

Mais elle préférait aller au bout de l’inconfort – qui la rassurait, malgré le délai infligé – plutôt que sacrifier l’illusion de ne rien céder au hasard, ou rater une once de la diversité qu’un principe mystérieux (était-il hérité d’une aïeule scrupuleuse qui aurait déserté la mémoire familiale) lui disait d’explorer. 

 Crédit image © Marc Petit, Le Printemps, 2011