Elle avait remarqué que, passé la cinquantaine, grimper un escalier en courant était moins fatigant que poser calmement un pied sur chaque marche.
La vitesse gagnée à gravir les étages – qui s’accentuait au fil de l’exercice – diminuait d’autant les efforts à fournir.
En outre le balancier des bras permettait d’accélérer le mouvement, en augmentant la force de l’énergie mobile.
C’est par cet artifice qu’elle continuerait d’avancer dans la vie, se disait-elle – et tant pis si ce n’était qu’une ruse pour mieux feinter le temps.
C’est en s’appuyant sur ces fausses béquilles qu’on se hissait en haut de l’existence, sans risque d’essouffler son désir.
Elle s’imaginait projetée ainsi dans l’avenir : si son moteur restait en surrégime, elle aurait plus de chances de ne pas s’apercevoir (un peu comme la poule décapitée continue de courir) qu’un petit plaisantin avait coupé le contact.
© Schindler